Mon contrat contient une clause d’arbitrage : Dois-je paniquer ?
Auteur : ENGLISH Benjamin
Publié le :
08/12/2020
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2020
Un contrat vous lie à un tiers, avec lequel un litige survient. En étudiant ce contrat, vous vous apercevez qu’il comporte dans les dernières pages une clause compromissoire. Il s’agit de la clause par laquelle les parties conviennent, en cas de survenance d’un contentieux, de régler le litige par la voie de l’arbitrage, alternative à la saisine des juridictions publiques. Le ou les arbitres sont donc choisis, indépendants, et ils tranchent le litige. Bien souvent, les parties ne portent pas leur attention au moment de la conclusion du contrat sur ces clauses dites « de litiges ». Et ce n’est que le moment venu qu’elles les découvrent.
Pour autant, la présence de cette clause est-elle une mauvaise nouvelle ? Pas forcément. Tout d’abord, il conviendra de se demander si cette clause est opposable : Pour être valide, elle doit être rédigée de manière claire et permettre de savoir quelle a été la volonté réelle des parties. En effet, certaines clauses sont rédigées de manière tellement imprécise que l’on peut se demander si le rédacteur a voulu mettre en place une procédure d’arbitrage, ou de conciliation ou de médiation, qui sont des processus très différents.
De la même manière, un arbitrage ne sera pas possible si le conflit touche à une question de droit d’ordre public. En revanche, il n’est pas interdit de mettre en place un arbitrage entre un professionnel et un particulier. Il faut juste savoir que ce dernier pourra refuser de s’y soumettre.
Si la clause est valide, la juridiction publique qui serait éventuellement saisie par l’une des parties devra se déclarer incompétente. Donc, dans bon nombre de cas, on ne pourra pas la contourner.
Pour autant, il s’agit peut-être d’une opportunité et il ne faut pas laisser les préjugés prendre le dessus.
En effet, l’arbitrage présente les avantages de la confidentialité, de la rapidité et de permettre de s’adjoindre les services d’un arbitre spécialisé. Il est recommandé dans bon nombre de secteurs, et l’accélération des échanges économiques plaide incontestablement pour cette institution ancienne en pleine révolution.
Reste que l’argument souvent opposé est celui du coût, puisqu’à la différence de la juridiction étatique, le ou les arbitres sont rémunérés.
Toutefois, la marge de manœuvre des parties sera différente en fonction du contenu de la clause compromissoire. Celle-ci peut être extrêmement détaillée. Elle peut même prévoir des seuils de déclenchement en fonction du montant du litige. Elle peut également prévoir les modalités de désignation des arbitres. Souvent, chacune des parties désignera un arbitre, et les deux arbitres désigneront un troisième, chargé de présider l’instance.
La clause peut également faire référence à une institution d’arbitrage, c’est-à-dire un centre, doté d’un règlement d’arbitrage, qui va être chargé d’organiser l’instance arbitrale, et notamment de proposer des arbitres. Aujourd’hui elles disposent en outre souvent de grilles tarifaires permettant d’anticiper le coût. Cependant, les institutions spécialisées traitent souvent de litiges avec des enjeux très importants (ce qui leur fait honneur), mais avec un coût d’arbitrage nécessairement proportionnel.
Si la clause ne fait pas référence à une institution d’arbitrage précise, les parties restent libres, soit de se rapprocher de tel ou tel centre, soit d’organiser librement le tribunal arbitral. On parle alors d’arbitrage « ad hoc », ce qui suppose, en l’absence de support logistique et administratif, que le ou les arbitres désignés (il peut s’agir d’un arbitre unique) soi(en)t relativement aguerri(s) en la matière, ou au moins que les conseils des parties le soient.
Pour autant, l’organisation de l’arbitrage pourra alors souffrir d’une inertie logistique qui nuira à l’exigence de rapidité initiale, la sentence devant être rendue dans un délai de six mois à compter du compromis d’arbitrage.
On note depuis quelques mois un intérêt croissant des acteurs de l’arbitrage pour la digitalisation (voir un article récent sur le sujet). Il est vrai que la souplesse de la procédure permet d’établir des conventions dans lesquels les parties acceptent de recourir à des moyens dématérialisés et modernes, comme l’utilisation d’espaces partagés ou la visioconférence, permettant de s’affranchir des contraintes logistiques et d’éloignement, même lorsqu’il y a plus de deux parties (voir la page dédiée du cabinet de l’auteur du présent article).
Pour aller plus loin, on voit aujourd’hui émerger de véritables plates-formes ayant largement automatisé le circuit de constitution du tribunal arbitral, puis l’instruction, sans aucune concession à la déontologie, mais pour une meilleure efficience et en faisant baisser le coût de manière drastique.
Tel est le cas par exemple de la plate-forme madecision.com mise en place par le réseau Eurojuris France qui permet de disposer d’un panel très large d’arbitres. Cette initiative a été saluée par la presse professionnelle comme Forbes France ou B Smart et par les experts de l’innovation légale (voir la vidéo de test réalisée par Arthur Sauzé). On précisera que l’émergence de telles solutions est accompagnée par les pouvoirs publics avec la mise en place imminente d’un système de certification.
À cet égard, les rédacteurs des clauses pourront prévoir la référence à de telles plates-formes. Mais à défaut, les parties peuvent tout à fait convenir d’y avoir recours a posteriori, car elles peuvent au moins s’accorder sur l’intérêt commun d’obtenir une décision rapide, pertinente et confidentielle.
L’argument lié au coût ne sera alors plus un prétexte pour que les praticiens se saisissent d’une alternative permettant de répondre à un double besoin de confidentialité et de rapidité souvent exigées par les clients, notamment les entreprises.
L’arbitrage interne (par opposition à l’arbitrage international) est régi par les articles 1442 et suivants du Code de procédure civile. Il est vivement conseillé aux parties de se faire assister par un conseil, qui maîtrisera la procédure, et construira une argumentation juridique cohérente.
Cet article n'engage que son auteur.
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